Quelques précisions sur l’espérance de vie et les probabilités de survie
Le risque de longévité représente, pour bien des retraités et retraitées, le risque financier le plus important. Une mauvaise estimation de la durée de vie peut mener à un épuisement prématuré du capital, compromettant la sécurité financière à un moment où les marges de manœuvre sont réduites.
Pour encadrer les projections de manière rigoureuse et cohérente, l’Institut de planification financière (Institut) recommande l’utilisation d’un tableau de probabilités de survie. Ce tableau est fondé sur les tables de mortalité CPM 2014, élaborées à partir de données issues de régimes de retraite publics et privés canadiens, et mises à jour régulièrement afin de refléter l’évolution des tendances démographiques et les progrès en matière de longévité.
Selon les lignes directrices actuelles, il est recommandé de ne pas limiter l’horizon de planification à une période où la probabilité de survie excède 25 %. En d’autres termes, la projection devrait couvrir une période suffisamment longue pour que la chance qu’un client ou une cliente soit encore en vie à la fin de cette période soit d’au plus 25 %. Cette approche prudente vise à réduire le risque d’épuisement des actifs.
Cela dit, cette méthode doit être adaptée au profil de chaque client et cliente. Une personne en excellente santé ou ayant de bonnes habitudes de vie pourrait raisonnablement vivre au-delà des prévisions statistiques. À l’inverse, une personne présentant des risques importants pourrait nécessiter un ajustement à la baisse. Des outils actuariels permettent justement d’élaborer des projections personnalisées, notamment en cas d’assurabilité particulière ou de grande différence d’âge entre conjoints ou conjointes.
Ce texte propose d’explorer plus en détail comment le tableau de l’Institut est construit, ainsi que certains aspects techniques qui l’accompagnent.
Espérance de vie et probabilités
L’espérance de vie ne se limite pas à « l’âge moyen au décès » d’un individu. Cette notion mérite d’être nuancée, car plusieurs définitions sont possibles.
Par exemple, on pourrait la définir comme le point milieu entre l’âge actuel d’une personne et l’âge maximal observé dans les tables de longévité. Cette approche pourrait sembler logique si les décès étaient répartis uniformément à travers tous les âges, ce qui n’est pas le cas, car la plupart des décès surviennent à un âge avancé.
Une autre possibilité serait de considérer l’âge qu’une personne a 50 % de chances d’atteindre. Bien que cette estimation soit plus réaliste statistiquement, elle ne reflète toujours pas la véritable définition de l’espérance de vie.
Il faut savoir que la probabilité d’atteindre un âge donné est la base utilisée par l’Institut pour établir ses recommandations. L’espérance de vie, même si elle peut être dérivée des mêmes tables de mortalité, joue ici un rôle secondaire.
Techniquement, l’espérance de vie correspond au nombre moyen d’années vécues par une cohorte d’individus. Mais comme les tables de mortalité s’expriment en probabilités de décès et non en nombre de survivants ou survivantes, leur application à un seul individu donne un résultat plutôt théorique : c’est comme si la personne « mourait un peu » chaque année, jusqu’à disparaître complètement à 115 ans ou à la fin de la table.
Dans cette perspective, on comprend pourquoi l’espérance de vie n’est pas toujours l’indicateur le plus pertinent pour planifier. Ce qui importe vraiment, c’est la probabilité qu’une personne atteigne un âge donné, et non la moyenne théorique de la durée de vie de sa génération. D’ailleurs, il n’est pas rare que l’âge correspondant à une probabilité de survie de 50 % diffère de plus de deux ans par rapport à l’espérance de vie calculée.
Table de mortalité et facteurs d’amélioration

La toute première table de mortalité a été publiée en 1662, dans Natural and Political Observations Made Upon the Bills of Mortality, de John Graunt, un marchand de textile londonien. Il est aujourd’hui reconnu comme l’un des pionniers de la démographie.
Depuis cette époque, les tables de mortalité ont considérablement évolué. Elles se sont raffinées et sont désormais capables de s’adapter à des groupes précis selon des critères comme le sexe, le statut de fumeur, l’état de santé ou encore le niveau de revenu.
Leur usage varie également selon le contexte. Par exemple, les tables utilisées en assurance ne seront pas les mêmes que celles utilisées en planification de retraite. Selon les sources de données disponibles, de nouvelles tables peuvent apparaître ou être remplacées dans les calculs actuariels. Pour éviter qu’elles deviennent rapidement obsolètes, des facteurs d’amélioration qui tiennent compte des gains attendus en espérance de vie y sont intégrés. Cela permet aux tables de rester pertinentes, dans la mesure où les améliorations projetées s’avèrent réalistes.
Les tables utilisées par l’Institut sont issues d’analyses rigoureuses, et les probabilités qu’elles présentent doivent être prises au sérieux.
La table actuellement en vigueur est la CPM 2014, acronyme de Canadian Pensioners’ Mortality. Elle remplace celle de 1994. Comme son nom l’indique, cette table est centrée sur la mortalité des retraités et retraitées de régimes de retraite canadiens. Elle est donc particulièrement adaptée aux projections liées au décaissement à la retraite.
Elle a été publiée en février 2014 dans un rapport de l’Institut canadien des actuaires (ICA) intitulé La mortalité des retraités canadiens. Ce rapport repose sur deux grandes études : l’une portant sur les régimes publics (RPC et RRQ), avec des données remontant à 1967, première année où des prestations de ces régimes ont été versées, et l’autre sur des régimes agréés entre 1999 et 2008. Cette seconde étude portait sur environ 100 000 participants et participantes, dont un peu plus de la moitié étaient issus des régimes publics, les autres provenant de régimes privés. Les données ont été ajustées pour tenir compte notamment des différences de taille entre les régimes étudiés.
La table distingue les retraités et retraitées selon le sexe et le type de régime (public ou privé). Une moyenne pondérée permet ensuite de produire des taux représentatifs, appelés taux composés.
Voici un extrait de ces taux avec les taux différenciés Homme et Femme.
Âge | Homme | Femme | Âge | Homme | Femme | Âge | Homme | Femme | Âge | Homme | Femme |
35 | 0,00120 | 0,00042 | 55 | 0,00403 | 0,00207 | 75 | 0,02183 | 0,01469 | 95 | 0,24808 | 0,18902 |
36 | 0,00120 | 0,00045 | 56 | 0,00448 | 0,00231 | 76 | 0,02449 | 0,01649 | 96 | 0,27346 | 0,21263 |
37 | 0,00122 | 0,00048 | 57 | 0,00495 | 0,00258 | 77 | 0,02754 | 0,01859 | 97 | 0,29848 | 0,23897 |
38 | 0,00125 | 0,00053 | 58 | 0,00542 | 0,00287 | 78 | 0,03105 | 0,02106 | 98 | 0,32273 | 0,26615 |
39 | 0,00130 | 0,00057 | 59 | 0,00587 | 0,00318 | 79 | 0,03511 | 0,02394 | 99 | 0,34602 | 0,29275 |
40 | 0,00136 | 0,00061 | 60 | 0,00628 | 0,00350 | 80 | 0,03981 | 0,02729 | 100 | 0,36843 | 0,31779 |
41 | 0,00144 | 0,00065 | 61 | 0,00666 | 0,00384 | 81 | 0,04522 | 0,03118 | 101 | 0,39026 | 0,34076 |
42 | 0,00154 | 0,00069 | 62 | 0,00702 | 0,00421 | 82 | 0,05144 | 0,03568 | 102 | 0,41203 | 0,36161 |
43 | 0,00165 | 0,00075 | 63 | 0,00743 | 0,00464 | 83 | 0,05854 | 0,04085 | 103 | 0,43454 | 0,38072 |
44 | 0,00178 | 0,00080 | 64 | 0,00790 | 0,00511 | 84 | 0,06660 | 0,04677 | 104 | 0,45879 | 0,39894 |
45 | 0,00190 | 0,00086 | 65 | 0,00844 | 0,00562 | 85 | 0,07571 | 0,05352 | 105 | 0,47904 | 0,41916 |
46 | 0,00205 | 0,00092 | 66 | 0,00907 | 0,00617 | 86 | 0,08596 | 0,06118 | 106 | 0,49928 | 0,43937 |
47 | 0,00219 | 0,00101 | 67 | 0,00981 | 0,00675 | 87 | 0,09744 | 0,06984 | 107 | 0,51950 | 0,45956 |
48 | 0,00234 | 0,00109 | 68 | 0,01066 | 0,00739 | 88 | 0,11026 | 0,07959 | 108 | 0,53970 | 0,47973 |
49 | 0,00250 | 0,00119 | 69 | 0,01166 | 0,00809 | 89 | 0,12454 | 0,09054 | 109 | 0,55987 | 0,50988 |
50 | 0,00266 | 0,00129 | 70 | 0,01282 | 0,00886 | 90 | 0,14041 | 0,10280 | 110 | 0,58000 | 0,53000 |
51 | 0,00285 | 0,00141 | 71 | 0,01417 | 0,00973 | 91 | 0,15801 | 0,11650 | 111 | 0,60000 | 0,55000 |
52 | 0,00307 | 0,00153 | 72 | 0,01571 | 0,01072 | 92 | 0,17750 | 0,13178 | 112 | 0,62000 | 0,57000 |
53 | 0,00333 | 0,00168 | 73 | 0,01749 | 0,01185 | 93 | 0,19909 | 0,14883 | 113 | 0,64000 | 0,59000 |
54 | 0,00365 | 0,00186 | 74 | 0,01952 | 0,01316 | 94 | 0,22299 | 0,16783 | 114 | 0,66000 | 0,61000 |
115 | 1,00000 | 1,00000 |
Chaque âge mentionné dans la table correspond à l’anniversaire le plus proche au 1er janvier d’une année donnée, suivi de la probabilité de décéder au cours de cette même année. Par exemple, un homme âgé de 90 ans au 1er janvier présente une probabilité de 14,041 % de décéder dans l’année, ce qui implique qu’il a environ 86 % de chances d’être encore en vie au 31 décembre.
La table s’étend jusqu’à l’âge de 115 ans, âge auquel la probabilité de décès atteint 1,0000, autrement dit 100 %.
Comme évoqué précédemment, ces taux de mortalité sont ajustés pour tenir compte des améliorations projetées en matière de longévité. Ces ajustements visent à refléter l’impact des meilleures conditions de vie, des avancées médicales et, plus largement, du progrès scientifique.
L’Institut utilise actuellement la table d’amélioration CPM-B. Cette table est structurée en trois grandes périodes :
- De 2000 à 2011 : ces années ne sont plus d’actualité, mais elles servaient à lisser les données issues de l’étude sur les régimes publics (RPC/RRQ). Pour les personnes âgées de 65 ans et plus, ces facteurs sont dérivés de ces courbes lissées. Pour les moins de 50 ans, les hypothèses proviennent directement des hypothèses du RPC en 2010. Pour les âges intermédiaires, une interpolation linéaire est appliquée.
- De 2012 à 2029 : la période actuelle d’ajustement repose sur une interpolation linéaire entre les facteurs de 2011 et ceux projetés pour 2030 et au-delà.
- À partir1 de 2030 : c’est ici que les hypothèses ont le plus d’impact. Le taux d’amélioration dit « ultime », issu des projections du RPC, est fixé à 0,8 % pour les personnes de moins de 83 ans. Il diminue progressivement à 0,4 % à 92 ans, selon une interpolation linéaire à partir de 83 ans. Il est ensuite réduit à 0,3 % pour les âges entre 97 et 107 ans (avec interpolation à partir de 93 ans), puis à 0,139 % à l’âge de 114 ans, avec interpolation entre 108 et 114 ans.
Pour calculer la probabilité de décès ajustée d’une personne donnée, il faut appliquer ces facteurs d’amélioration année après année au taux de mortalité de base de la table CPM 2014. Cela revient à réduire progressivement le taux chaque année, en fonction de l’amélioration prévue.
1 Merci à Nathalie Bachand notamment pour cette précision.
À titre d’exemple, voici un extrait illustrant l’amélioration des taux pour des hommes âgés de 60 et 61 ans.
|
60 ans |
61 ans |
---|---|---|
2014 | 0,02344 | 0,02439 |
2015 | 0,02247 | 0,02337 |
2016 | 0,02151 | 0,02234 |
2017 | 0,02054 | 0,02132 |
2018 | 0,01958 | 0,02029 |
2019 | 0,01861 | 0,01927 |
2020 | 0,01765 | 0,01825 |
2021 | 0,01668 | 0,01722 |
2022 | 0,01572 | 0,01620 |
2023 | 0,01475 | 0,01517 |
2024 | 0,01379 | 0,01415 |
2025 | 0,01282 | 0,01312 |
2026 | 0,01186 | 0,01210 |
2027 | 0,01089 | 0,01107 |
2028 | 0,00993 | 0,01005 |
2029 | 0,00896 | 0,00902 |
2030 | 0,00800 | 0,00800 |
Pour estimer l’espérance de vie et les probabilités de survie d’un homme âgé de 60 ans en 2025, il faut appliquer les facteurs d’amélioration à partir de la table CPM 2014, en tenant compte des ajustements année par année.
La démarche consiste à prendre le taux de mortalité de base issu de la table CPM 2014 à 60 ans — soit 0,00628 — puis à le corriger en multipliant successivement par (1 — facteur d’amélioration) pour chaque année entre 2014 et 2025.
Concrètement, le calcul donne :
Taux de mortalité à 60 ans en 2025 =
0,006 28 × (1 – 0,02344) × (1 – 0,02247) ×… × (1 – 0,01282) = 0,005163
L’année suivante, en 2026, cet homme aura 61 ans. Il faudra alors utiliser le taux de base pour 61 ans (0,00666) et l’ajuster avec les facteurs d’amélioration allant jusqu’en 2026 :
Taux de mortalité à 61 ans en 2026 =
0,006 66 × (1 – 0,02439) × (1 – 0,02337) ×… × (1 – 0,01210) = 0,005373
Cette méthode est appliquée de la même manière pour chaque âge jusqu’à la fin de la table, afin d’obtenir une série complète de taux de mortalité ajustés année après année.
Voici à quoi ressemble cette série annuelle pour un homme de 60 ans en 2025.
Année |
Âge |
Taux mort. |
Prob (vivant) |
Durée vécue |
---|---|---|---|---|
2025 | 60 | 0,005163 | 0,994837 | 0,997419 |
2026 | 61 | 0,005373 | 0,989492 | 0,992165 |
2027 | 62 | 0,005561 | 0,983990 | 0,986741 |
2028 | 63 | 0,005784 | 0,978299 | 0,981145 |
2029 | 64 | 0,006049 | 0,972381 | 0,975340 |
2030 | 65 | 0,006364 | 0,966193 | 0,969287 |
2031 | 66 | 0,006784 | 0,959638 | 0,962916 |
2032 | 67 | 0,007279 | 0,952653 | 0,956146 |
2033 | 68 | 0,007847 | 0,945178 | 0,948915 |
2034 | 69 | 0,008514 | 0,937131 | 0,941154 |
2035 | 70 | 0,009286 | 0,928429 | 0,932780 |
2036 | 71 | 0,010195 | 0,918963 | 0,923696 |
2037 | 72 | 0,011227 | 0,908646 | 0,913805 |
2038 | 73 | 0,012415 | 0,897365 | 0,903006 |
2039 | 74 | 0,013763 | 0,885015 | 0,891190 |
2040 | 75 | 0,015288 | 0,871484 | 0,878249 |
2041 | 76 | 0,017036 | 0,856638 | 0,864061 |
2042 | 77 | 0,019029 | 0,840337 | 0,848487 |
2043 | 78 | 0,021310 | 0,822430 | 0,831383 |
2044 | 79 | 0,023934 | 0,802746 | 0,812588 |
2045 | 80 | 0,026956 | 0,781107 | 0,791926 |
2046 | 81 | 0,030768 | 0,757074 | 0,769091 |
2047 | 82 | 0,035170 | 0,730448 | 0,743761 |
2048 | 83 | 0,040669 | 0,700741 | 0,715595 |
2049 | 84 | 0,047052 | 0,667770 | 0,684256 |
2050 | 85 | 0,054437 | 0,631419 | 0,649594 |
2051 | 86 | 0,062951 | 0,591670 | 0,611545 |
2052 | 87 | 0,072736 | 0,548635 | 0,570153 |
2053 | 88 | 0,083961 | 0,502571 | 0,525603 |
2054 | 89 | 0,096818 | 0,453913 | 0,478242 |
2055 | 90 | 0,111525 | 0,403290 | 0,428602 |
2056 | 91 | 0,128328 | 0,351537 | 0,377414 |
2057 | 92 | 0,147515 | 0,299680 | 0,325609 |
2058 | 93 | 0,168170 | 0,249283 | 0,274482 |
2059 | 94 | 0,191515 | 0,201542 | 0,225412 |
2060 | 95 | 0,216723 | 0,157863 | 0,179702 |
2061 | 96 | 0,240034 | 0,119970 | 0,138917 |
2062 | 97 | 0,263348 | 0,088376 | 0,104173 |
2063 | 98 | 0,283890 | 0,063287 | 0,075832 |
2064 | 99 | 0,303464 | 0,044082 | 0,053685 |
2065 | 100 | 0,322148 | 0,029881 | 0,036981 |
2066 | 101 | 0,340212 | 0,019715 | 0,024798 |
2067 | 102 | 0,358113 | 0,012655 | 0,016185 |
2068 | 103 | 0,376544 | 0,007890 | 0,010272 |
2069 | 104 | 0,396365 | 0,004763 | 0,006326 |
2070 | 105 | 0,412618 | 0,002797 | 0,003780 |
2071 | 106 | 0,428762 | 0,001598 | 0,002198 |
2072 | 107 | 0,444788 | 0,000887 | 0,001243 |
2073 | 108 | 0,466334 | 0,000473 | 0,000680 |
2074 | 109 | 0,488432 | 0,000242 | 0,000358 |
2075 | 110 | 0,511107 | 0,000118 | 0,000180 |
2076 | 111 | 0,534331 | 0,000055 | 0,000087 |
2077 | 112 | 0,558245 | 0,000024 | 0,000040 |
2078 | 113 | 0,582883 | 0,000010 | 0,000017 |
2079 | 114 | 0,608299 | 0,000004 | 0,000007 |
2080 | 115 | 1,000000 | 0,000000 | 0,000002 |
Le tableau ajusté présente également une colonne appelée « Probabilité d’être vivant ». Il s’agit de la probabilité qu’une personne soit encore en vie à la fin d’une année donnée, en partant du principe qu’elle était vivante au début de 2025.
Pour mieux comprendre, imaginons une cohorte d’un million de personnes. Si l’on commence avec un million de personnes âgées de 60 ans en 2025, la probabilité de décès cette année-là est de 0,5163 %. Cela correspond à 5 163 décès au cours de l’année, ce qui laisse 994 837 survivants et survivantes au 31 décembre.
En 2026, le taux de mortalité passe à 0,5373 %. Appliqué aux 994 837 survivants et survivantes de l’année précédente, cela donne environ 5 345 décès. Il resterait alors 989 492 personnes vivantes à la fin de l’année. Et ainsi de suite.
Mais pour calculer l’espérance de vie, un léger ajustement est nécessaire. C’est là qu’intervient la dernière colonne du tableau : la « Durée vécue ».
Cette colonne tient compte non seulement des survivants et survivantes à la fin de l’année (qui ont vécu toute l’année), mais aussi de celles et ceux qui sont décédés en cours d’année. Pour ces derniers, on suppose en général qu’ils ont vécu en moyenne une demi-année. Cette hypothèse, dite « de distribution uniforme des décès », est couramment utilisée en actuariat, de la même manière qu’on applique parfois une hypothèse de début, de fin ou de milieu de période dans les calculs d’investissements.
Reprenons notre exemple : en 2025, sur un million de personnes, 994 837 ont survécu toute l’année et 5 163 sont décédées. On estime donc que ces 5 163 personnes ont vécu en moyenne une demi-année, soit l’équivalent de 2 582 années complètes. En ajoutant ces années aux 994 837 années vécues par les survivants et survivantes, on obtient un total de 997 419 années vécues par la cohorte. Divisé par un million, cela donne la durée moyenne vécue pour l’année 2025.
Une autre méthode, un peu plus rapide dans un contexte de décès uniformément répartis, consiste à prendre simplement la moyenne du nombre de personnes vivantes au début et à la fin de l’année, et à leur attribuer une année complète. Par exemple, pour 2026, cela donne (994 837 + 989 492)/2 = 992 165 années vécues.
C’est dans cette colonne de durée vécue que l’on trouve les âges du tableau de l’Institut. Pour connaître, par exemple, l’âge à partir duquel la probabilité de survie tombe sous le seuil de 25 %, il suffit de descendre dans le tableau jusqu’à excéder ce point. Dans l’exemple traité, ce seuil est franchi à l’âge de 94 ans.
Quant à l’espérance de survie à 60 ans, elle correspond à la somme de toutes les valeurs de cette colonne à partir de 2025. Cette somme donne une espérance de vie de 27,34 années. En ajoutant cette valeur à l’âge de départ (60 ans), on obtient une espérance de vie de 87,34 ans.
Fait intéressant : si l’on compare cette valeur à l’âge correspondant à une probabilité de 50 % d’être encore en vie (89 ans), l’écart est notable. Même en interpolant linéairement pour identifier un âge précis où la probabilité atteint 50 %, une différence subsiste toujours, à moins d’un hasard extraordinaire.
Le futur de la table de probabilités de survie de l’Institut
Jusqu’ici, nous avons décrit la table actuellement utilisée. Mais il faut souligner qu’elle repose sur des hypothèses formulées il y a plus de dix ans. Et on pourrait considérer aujourd’hui qu’elle est trop conservatrice.
Le facteur le plus déterminant à long terme est le taux d’amélioration ultime, soit le rythme prévu de réduction de la mortalité dans le futur. En septembre 2017, un autre rapport de l’ICA recommandait une nouvelle échelle, appelée MI-2017. Celle-ci suggérait un taux d’amélioration de 1,0 % par année jusqu’à 90 ans, interpolé jusqu’à 0,2 % à 100 ans, puis réduit graduellement à 0 % à 103 ans.
Un rapport plus récent, publié en 2024, propose, quant à lui, une autre table d’amélioration : la MI-2024. Elle recommande un taux d’environ 1,3 % pour les âges de 40 à 90 ans, taux ultime qui serait atteint en 2049.
Autrement dit, la tendance n’est pas à la baisse : les projections d’amélioration de la longévité sont revues à la hausse et il n’est pas impossible que l’Institut revoie les paramètres de projections afin de refléter de mieux en mieux la réalité.
Quoi qu’il en soit, ce qui compte avant tout, c’est d’utiliser le tableau correctement et de ne pas sous-estimer les probabilités de survie qu’il contient.
Lecture complémentaire :
Lire les autres articles de cette édition
- Finances Rester solide dans l’incertain arrow_forward
- Fiscalité Fiducies : astuces pour une planification réussie arrow_forward
- Assurance Valeurs de rachat : modes d’accès et enjeux pratiques arrow_forward
- Aspects légaux et succession Comprendre les volontés médicales de sa clientèle arrow_forward
- Placements La diversification et les investissements alternatifs arrow_forward
- Retraite Planifier avec les probabilités de survie arrow_forward
- Dossier Le pari du perdant ravi : quand réclamer la rente du RRQ arrow_forward